Depuis une semaine, l'Italie connaît une petite crise politique comme elle en connaît régulièrement depuis les années 1980. Elle le doit à son mode de scrutin qui a souvent été revisité mais n'a jamais convaincu. Le dernier relooking de ce mode de scrutin date du dernier gouvernement Berlusconi qui avait fait voter par l'Assemblée Nationale (à l'époque largement en sa faveur) un système proportionnel pur. J'en profite d'ailleurs pour dire mes réticences sur un mode de scrutin à la proportionnelle. L'idée de vouloir représenter scrupuleusement le vote des électeurs est assez séduisante à la base. Néanmoins, cela aiguise les appétits personnels et l'Assemblée se morcelle alors en de nombreux partis qui ont quelques députés, mais qui en les additionnant font basculer la majorité. De plus, comme ils se retrouvent à l'Assemblée, ils veulent se faire entendre et défendre leur position. Ce qui est tout à fait normal, mais cela oblige à faire un grand écart pour se reposer sur une majorité à l'Assemblée. En France, certains candidats se prononcent pour un système proportionnel. Je leur conseillerais de faire attention et de n'introduire qu'une petite dose de proportionnelle. La France n'a pas besoin de ce problème supplémentaire pour faire les nombreuses réformes nécessaires.

Quoi qu'il en soit, Romani Prodi - président du conseil Italien - a dû faire face à ce problème de morcellement. Sa majorité est composée par pas moins de 12 partis allant des catholiques aux Verts en passant par les communistes, et ne compte que 2 voix de majorité au Sénat. C'est d'ailleurs au Sénat que son gouvernement avait été mis en minorité à propos d'un vote sur sa politique étrangère. Il avait alors proposé sa démission au Président de la République (qui en Italie, n'a quasiment que cette tâche). Ce dernier a réfléchi pendant deux jours en recevant tous les chefs de partis, pour prendre la décision de ne pas accepter cette démission et de le renvoyer devant les deux chambres pour un vote de confiance. Il ne devrait pas avoir de problèmes à l'Assemblée mais au Sénat, le problème reste le même : deux voix de majorité seulement ! En ce début de semaine, Romano Prodi a essayé de resserrer les rangs de la majorité en demandant à tout le monde de parler d'une même voix avec le petit doigt sur la couture du pantalon. Il a également négocié et clarifié ses engagements pour rallier le plus grand nombre... notamment la proposition d'adopter un nouveau mode de scrutin pour assurer une majorité plus large au vainqueur. Mais finalement, l'épouvantail d'un retour de la Droite au pouvoir - dans le cas d'élections dans les prochaines semaines - a été le meilleur ciment entre les partis de Gauche. Autrement dit, il ne se passera pas grand chose en Italie dans les 5 prochaines années si les choses restent en l'état (enfin ça n'engage que moi).

Le vote de confiance au Sénat était prévu pour aujourd'hui vers 21h et la chaîne de télé Rai2 (équivalent de France2) a diffusé en direct la séance entière puis le vote. Les rangs étaient clairsemés au départ mais se sont remplis petit à petit. Sans grande surprise, chaque représentant de partis a fait un petit discours très encenseur ou totalement critique à l'encontre de Romano Prodi selon la partie de l'hémicycle où il se trouvait. Mais le suspens était entier puisqu'il n'est pas évident de contrôler les 162 individualités nécessaires pour faire le plein de voix et avoir ces fameuses 2 voix de majorité... 319 sénateurs ont donc voté il y a quelques instants dont ... suspens ... 162 pour la confiance au gouvernement. La crise politique totale a été évitée, mais jusqu'à quand ? Je vous laisse avec la première déclaration après le vote qui est l'oeuvre du porte parole de Democratici di Sinistra : "c'est un vote tout à fait normal puisque nous avons une majorité claire" ...